Lorsqu’on écoute de près la Troisième Symphonie de Brahms, on s’aperçoit qu’elle est truffée de pièges. La mélodie romantique qu’on connaît par cœur depuis le film d’Anatole Litvak n’est facile qu’en apparence, la symphonie comporte des solos de cor qui feraient perdre le souffle à un marathonien, des entrelacs de tempos où les violons risquent de larguer les violoncelles en route, des mélis-mélos de hautbois, clarinette et basson où chacun doit garder impeccablement son rythme sous peine de crash général. Mais quand on aime, on ne compte pas : c’est ainsi que Musiques en Seine, un orchestre d’une quarantaine de musiciens amateurs, n’a pas hésité à s’attaquer au chef d’œuvre qu’il a donné en concert il y a quelques semaines sous la direction efficace et bienveillante de Constantin Rouits. Résultat : un petit flottement par ci par là, mais une belle tenue d’ensemble parce que la passion permet de déplacer les montagnes. En ouverture, Musiques en Seine a joué le Concerto pour violoncelle d’Elgar, avec en soliste Noé Natorp, dix-neuf ans seulement, un son profond déjà. « Il n’y a que deux classes d’hommes distinctes sur la terre : celle qui sent l’enthousiasme et celle qui le méprise, » écrivait en 1807 madame de Staël dans Corinne ou l’Italie. Chez les musiciens c'est d'autant plus vrai.
Gérard Pangon
PS : Qui plus est, ce concert était donné au profit d’une ONG, Les Amis des Enfants du Monde. Enthousiasme et générosité vont de pair.