Vendredi 29 mars 2024
Concerts & dépendances
Les débuts wagnériens de Daniele Rustioni à l’Opéra national de Lyon étaient attendus. À en juger dès son Ouverture de Tannhäuser, ils sont fulgurants : battue alerte et claire, cordes cinglantes, vents opulents donnent une version lumineuse et dégraissée de cette partition riche en sucre. Et qui ne craint pas d’emmener Wagner sur les chemins battus de la musique de film, en écho avec les choix de David Herman, le metteur en scène. Ses choix, ceux d’un univers à la Star Wars, cultivant avec finesse les poncifs du genre S.F., se marient à merveille avec l’univers mythologique du 1er acte (aux effets lumineux de toute beauté), et ne s’en sort pas si mal ensuite dans celui judéo-chrétien, où le parallèle est loin d’être évident, surtout en l’absence d’un Jésus-Christ superstar. Sur le plateau, les femmes dominent, avec une Vénus (Irène Roberts) aux graves envoûtants, mêlant froideur et volupté, tandis qu’Élisabeth (Johanni Van Oostrum), tout aussi frêle en apparence et jouant elle aussi de contrastes entre suavité et hiératisme, est d’une impressionnante présence sur scène. Hommes et femmes du chœur ? Ils sont à faire pâlir les ensembles wagnériens les plus réputés. Côté hommes, Wolfram (Christoph Polh), Walter (Robert Lewis), Hermann (Liang Li) et les autres raviront même les plus exigeants. Alors, ce Tannhäuser, une totale réussite ? Hélas non, par le seul rôle titre (Stephen Gould), pour qui chanter est hurler, rustaud au-delà de toute mesure, et qu’on verrait bien troqué… contre Walter.
Albéric Lagier
 
Opéra national de Lyon, jusqu’au 30 octobre. Une coproduction avec le Teatro Real de Madrid. (Photo © DR ). 

dimanche 16 octobre 2022 à 00h08
Premier nouveau spectacle de la saison à l’Opéra Bastille : Salomé de Richard Srauss. Difficile de ne pas comparer la mise en scène de l’Américaine Lydia Steier à celle d’Andrea Breth il y a trois mois au festival d’Aix-en-Provence (voir ici), elle en est l’exact opposé : à la rigueur néo-brechtienne de celle-ci répond l’efflorescence post-moderne de celle-là, à la vision de l’adolescente « submergée par quelque chose qu’elle ne connait pas », celle d’« une femme qui ne voit pas d’issue au système corrompu dans lequel elle vit (…), qui la pousse à devenir extrémiste ». « Certaines scènes présentant un caractère violent et/ou sexuel explicite peuvent heurter la sensibilité d'un public non-averti » prévient le site de l’Opéra. Un caractère qui est l’essence même de l’ouvrage de Strauss et de la pièce d’Oscar Wilde dont il est tiré, et que Lydia Steier traduit  dans une esthétique entre Marvel et Fellini, s’écartant de la lettre de l’œuvre en transformant la "Danse des sept voiles" en viol collectif duquel Salomé sort ensanglantée, quittant ce monde détesté en compagnie du prophète Jochanaan tandis qu’est achevé son corps terrestre martyrisé : un féminisme bon teint (si l’on ose dire) mais moins subtil que celui d’Andrea Breth. Sous la baguette compétente mais sans finesse particulière de Simone Young, un plateau de premier ordre emporte la mise, tandis que la metteure en scène reçoit son lot (attendu) de sifflets : si Karita Mattila fait preuve de son abattage habituel mais force le trait en Hérodiade d’heroic fantasy, John Daszak (Hérode) et Iain Paterson (Jochanaan) sont des partenaires de haut vol pour la franco-sud-africaine Elza van der Heever, engoncée dans une camisole blanche (jusqu’à la Danse…), mais grande voix aux accents juvéniles idéale pour le rôle de Salomé, dont elle est d’ores et déjà une des meilleures titulaires. 
François Lafon 

Opéra National de Paris – Bastille, jusqu’au 5 novembre - En direct le 27 octobre sur L’Opéra chez soi et Medici.tv ainsi qu’au cinéma (Fra Cinéma, « Viva l’opéra » – En différé le 4 novembre à 21h sur Mezzo Live HD et le 30 novembre dans les cinémas CGR (Photo © Agathe Poupeney / OnP

 

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