A l’Oratoire du Louvre, Skip Sempé dirige le Requiem de Gilles revu et augmenté à l’occasion du service funèbre de Rameau (même lieu le 27 septembre 1764). Même plateau que pour le disque (voir ici), mais version encore plus étoffée d’ajouts ramistes. Un beau monstre pour un chef-d’oeuvre qui en a vu d’autres, utilisée pour les funérailles de Louis XV ainsi que pour celles, entre autres, de Campra, Stanislaw Leszczynski et Gilles lui-même, lequel s’en était réservé la primeur après l’avoir refusé à un commanditaire mauvais payeur. Etrange choix tout de même que cette musique typiquement XVIIème - bien que réinstrumentée et carrément postdatée dans les années 1760 - pour honorer un des compositeurs les plus novateurs du XVIIIème, provocation même lorsque la soprano (la charmante Judith van Wanroij) se lance dans un Pie Jesu mis en musique à l’italienne par Domenico Alberti, comme si Rameau n’avait pas représenté le parti français dans la Querelle des Bouffons. L’ensemble se tient pourtant, parce que le plateau est somptueux (magnifique Collegium Vocale de Gand, le choeur de Philippe Herreweghe), et que Skip Sempé s’entend à y faire souffler l’esprit qui réunit l’église et l’opéra.
François Lafon
Oratoire du Louvre, Paris, 17 et 18 septembre, dans le cadre de Terpsichore 2014. Autres concerts les 25 et 26 octobre, salle Erard (Skip Sempé - Pierre Hantai - Olivier Fortin, clavecin) - www.terpsichore-festival.com