Samedi 26 juillet 2025
Le cabinet de curiosités par François Lafon
Dimanche 29 juin, 1368 ème (!) et dernier concert du dimanche matin au TCE. Fin de partie pour son organisatrice depuis l’origine, en 1975, Jeanine Roze. Le lieu initial de ces concerts de 11 heures du matin a été la gare d’Orsay, désaffectée et confiée à l’époque comme théâtre à Jean Louis Barrault.  Et c’est le « coup de pouce » de Barrault qui a permis à la jeune productrice peu expérimentés qu’était à l’époque Jeanine Roze de lancer son aventure.
Ensuite, les lieux ont varié, du théâtre du Rond-Point au Châtelet, mais avec une fidélité d’un quart de siècle au « TCE »  Les ingrédients du succès doivent beaucoup au « flair » de l’organisatrice, à son sens de l’organisation, puis à une fidélité à toute épreuve, au fil des années ou des décennies, de « ses » musiciens. Ainsi de jeunes artistes peu connus devenus « stars » reviennent et permettent de donner leur chance à des petits jeunes peu connus. Les programmes ont été éclectiques, alternant le très classique avec un contemporain plus aventureux. Il y a même eu en complément un atelier pour enfants organisé au moment du concert. Bertrand Chamayou, « Monsieur Loyal » fervent de ce dernier concert, dont la recette ira intégralement aux « Petits frères des pauvres », l’a rappelé, égrenant ses propres souvenirs de jeune mélomane d’abord, puis de  tourneur de pages, grâce à son professeur Christian Ivaldi, avant de revenir à de nombreuses reprises, une fois devenu lui-même vedette. Dans une salle remplie jusqu’au second balcon, ce dernier concert fut une magnifique illustration de ces liens d’amitié avec la succession « surprise », après Chamayou, de Jean Claude Pennetier, Roger Muraro, Christian Ivaldi, Anne Queffelec, Shani Diluka, puis d’un duo composé d’Adam Laloum avec Victor Julien Laferrière, du Trio Wanderer, et enfin de François Morel avec Antoine Salher au piano, venus donner une note d’humour et de fantaisie à l’ensemble. La dernière touche, comme un dernier mot, a été donnée à  Bertrand Chamayou jouant  la Baigneuse de Trouville de Poulenc avec en arrière fond des dessins poétiques réalisés en direct par Grégoire Pont – Il n’a manqué que Philippe Jaroussky, ne pouvant venir en raison d’un deuil personnel tout récent. Il y eu enfin quelques projections vidéos d’Alexandre Tharaud, des frères Capuçon et du quatuor Ebène venus rajouter leur touche d’hommages émus et reconnaissants. L’héroïne, présente très discrètement au fond de la salle, est venue sur scène, mais, trop émue, a été incapable d’articuler le moindre mot.  Pourtant sa retraite d’organisatrice n’est pas définitive, la saison prochaine verra plusieurs concerts en soirée porter encore sa « griffe ».   
 Il est probable que la formule trouvera une façon de se renouveler, au vu de son attractivité éclatante, mais parfois certaines recettes ont une magie ou un « tour de main » personnel, qui ne garantit pas un même succès avec d’autres.
Denis Méchali

• Paris, Théâtre des champs Elysées. dimanche 29 juin 2025, 11 heures (Photo © DR
mercredi 18 juin 2025 à 19h00
Ce « livre disque » intéresse musicalement, agace un peu parfois, et séduit finalement. La partie non musicale est copieuse : 128 pages pour présenter le projet en Français, en  Anglais et en Japonais. Les interprètes sont le trio Georges Sand, l’altiste Violaine Despeyroux et  la joueuse de Koto Mieko Miyazaki,  grande interprète et ambassadrice de son instrument, une cithare Japonaise. Puis  les deux compositeurs Japonais, Misato Mochizuki et Dai Fujikura,  qui proposent deux œuvres originales, commandes de Radio France, insérées entre celles de Mozart, l’une d’elles étant pour quatuor avec piano et koto.
Le trio Georges Sand, créé en 2005, réunit la violoniste Virginie Buscail,  la pianiste Anne Lise Gastaldi et la violoncelliste Diana Ligeti. Ces musiciennes  ont créé en 2020 un label, Elstir, dont le nom révèle l’ambition : lier musique, littérature et d’autres arts, sous le parrainage de Marcel Proust. Pour ce projet un peu fantaisiste d’un voyage de Mozart au Japon, les musiciennes ont mobilisé l’auteur d’un « Dictionnaire amoureux du Japon », y ayant vécu plus de 30 ans, Richard Collasse, qui donne libre court à son imagination érudite : Il compose ainsi cinq lettres imaginaires de Mozart, à sa chère Constance, à sa sœur Nannerl, à Haydn, à Puchberg, et enfin à son guide au Japon, un certain Geino. Celle à Haydn permet de partager des réflexions musicales sur la composition et le métier, celles à Puchberg de raconter des anecdotes de voyages, certaines assez lestes, le divin Mozart ne restant pas insensible au savoir-faire d’une geisha nommée « Demoiselle Papillon », une estampe venant à la rescousse de notre  imagination. Enfin, comme « Papa Haydn », le guide devient « Papa Geino » – « Pa-Pa… ? » Oui c’est cela.  
 Il y a aussi  les dessins de Balthus pour les décors d’un Cosi fan Tutte donné à Aix en Provence en 1950, dont la présentation  est faite par Setsuko Klossowska de Rola, qui fut l’épouse de Balthus, et qui est depuis sa disparition défend l’œuvre. Elle parle de la passion de Balthus pour Mozart, durant sa vie entière. Enfin, pour la musique, Jean Michel Ferran, musicien et musicologue, a réalisé plusieurs transcriptions, réductions pour quatuor à cordes de l’ouverture de Cosi Fan Tutte,  de la sérénade de Don Giovanni pour trio à cordes et koto, qui donne un joli écrin  à l’écoute du  koto, en lieu et place de la mandoline. Les autres transcriptions sont moins convaincantes. Mais le CD comporte, en introduction et en guise de conclusion  deux quatuors à cordes, celui en mi bémol majeur K 493 et le quatuor n° 1 en sol mineur K 478. Ces deux merveilles sont défendues avec finesse et élégance par les musiciennes. Les deux œuvres originales sont ténues et raffinées, donnant un complément convaincant à ce voyage imaginaire, et surtout à cet hommage à un  Mozart génial et facétieux.
Denis Méchali

• Le voyage imaginaire de Mozart au Japon, Livre-CD Elstir collection, ENP 019 (distr. Outhere), 128 p., 1 h 17 min
• Prochains concerts du trio Georges Sand :  les 23/06 au Château de la Roche Guyon (95), avec A. Duperey (Fest  Colette « Un temps pour elles ») et  27/08 à Wissemburg (67 : « Mozart au Japon » avec V. Despeyroux et M. Miyazaki

 

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