Entre nouvelles parutions discographiques, concerts, représentations, Monteverdi est sans conteste dans l’air du temps. Ainsi, ce nouveau
Ritorno d’Ulisse in patria, premier des trois derniers ouvrages lyriques destinés à Venise en 1640 que dirige Stéphane Fuget à la tête des quatorze instrumentistes de son ensemble
Les Épopées. Remarqué l’an passé à l’occasion d’une première collaboration avec la collection Château de Versailles Spectacles (Vol. 1 de « Grands Motets » de Lully, voir
ici), le chef et son ensemble entamaient pour trois ans, conjointement avec Versailles, une résidence au Festival international d’opéra baroque de Beaune avec ce
Retour d’Ulysse en 2021 –
Orfeo a suivi le 27 juillet dernier et
L’Incoronazione di Poppea est prévu l’an prochain. Capté dans la foulée de sa reprise versaillaise en décembre dernier, sa distribution vocale demeure proche de celle de Beaune, si ce n’est qu’aux côtés de l’Ulysse du ténor Valerio Contaldo, le rôle de Pénélope a été confié à Lucile Richardot – qui l’avait déjà enregistré sous la direction de John Eliot Gardiner (3 CD Soli Deo Gloria, 2019). Ayant fait ses classes de clavecin et de direction avec Pierre Hantaï, Christophe Rousset, Ton Koopman et Marc Minkowski, Stéphane Fuget tranche par la qualité exceptionnelle de l’accompagnement des voix, qu’elles soient parlées, déclamées ou chantées. Au plus près du récitatif, l’articulation des instruments s’envole aussitôt :
« On récite en chantant, on se parle en chantant », explique Stéphane Fuget, fort de son expérience de chef de chant. Cette souplesse et cette respiration imprimées à la partition, s’appuyant sur la note de Monteverdi à propos de son
Lamento della Ninfa :
« À la vitesse des affects de l’âme, et non à celui de la main », n’auraient pu être obtenues sans la complicité des solistes – et quels solistes ! D’abord, l’engagement du couple royal Valerio Contaldo – déjà suprême Orphée monteverdien (lire
ici) – et Lucile Richardot – son arioso « Torna il tranquillo al mare » est à tomber ! – aux timbres richement colorés et aux caractères bien typés, tout comme ceux de La Fortune, Euriclée et Melanto tour à tour tenus par Ambroisine Bré, le jeune Alex Rosen, nouvelle basse idéalement sombre et profonde dans Le Temps, Neptune et Antinoos, Marie Perbost (Junon et L’Amour), L’Eumée de Cyril Auvity ainsi que la Minerve de Marielou Jacquard – autre jeune mezzo à suivre. Avec les interprètes, l’auditeur jubile au cœur de ce drame si éblouissant, à tel point qu’on guette avec impatience les prochains enregistrements.