Jeudi 28 mars 2024
Boîte à fantasmes
A Bayreuth, une énième relecture critique du testament wagnérien
Parsifal

Plus prophétique encore que ne l’aurait rêvé Wagner : de « festival scénique sacré » destiné à consacrer le théâtre-temple de Bayreuth, son Parsifal s’est mué en boîte à fantasmes, en grille de lecture récurrente d’une société de plus en plus illisible. Créé (et filmé) en 2016 et repris cette année, ce dernier en date des Parsifal bayreuthiens, mis en scène par Uwe Eric Laufenberg, a du mal à innover : Daech y est évoqué, les citations pullulent (jusqu’à La Tétralogie signée Chéreau-Boulez), les connaisseurs pointent les emprunts (le Parsifal « de » Dmitri Tcherniakov à Berlin), mais la direction d’acteurs est trop convenue et le propos trop diffus pour contenter les spécialistes tout en orientant les néophytes. Musicalement, pas non plus de grand frisson : Hartmut Haenchen, remplaçant le plus charismatique Andris Nelsons, ne donne ni dans l’extase mystique ni dans la relecture structurale, aussi objectif qu’il l’était en 2008 à l’Opéra Bastille (malgré la mise en scène décoiffante de Krzysztof Warlikowski). Dominé par Klaus Florian Vogt, dont le timbre clair  et la présence solaire (le contraire du ténébreux Jonas Kaufmann) va bien au Chaste Fol, le plateau est classieux mais sans surprise : Elena Pankratova (Kundry) chante mieux qu’elle ne joue, Ryan McKinny (Amfortas) joue mieux qu’il ne chante, et Georg Zeppenfeld – décidément la basse wagnérienne du moment – emporte la mise dans le rôle épuisant de l’ « évangéliste » Gurnemanz. 
François Lafon

Parsifal
Klaus Florian Vogt (Parsifal), Elena Pankratova (Kundry), Georg Zeppenfeld (Gurnemanz), Ryan McKinny (Amfortas), Gerd Grochowski (Klingsor), Karl-Heinz Lehner (Tirurel)
Choeurs et Orchestre du Festival de Bayreuth
Direction musicale : Hartmut Haenchen
Mise en scène : Uwe Eric Laufenberg
Réalisation : Michael Beyer
2 DVD Deutsche Grammophon 00440 073 5350
4 h 07 min

mis en ligne le samedi 26 août 2017

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