Jeudi 28 mars 2024
A la loupe
Jonas Kaufmann surexpose avec art le lied schubertien
Winterreise

A l’opéra, Jonas Kaufmann est partout, et dans tout : Lohengrin et Werther, Don Carlo et Cavaradossi. Personne ne s’en plaint : ténor sans ténoriser, comédien sans surjouer, il est en plus – ou d’abord – un musicien d’exception, capable de nuances et de couleurs, de phrasés délicats et d’éclats sans ostentation. En chanteur de lied grand format, il subjugue les salles, œil vif, élégance suprême, avec ce mélange de distance et de proximité propre au genre. Sur disque, c’est une autre affaire. Sa Belle Meunière mettait en avant son talent à faire vivre les images intérieures et les sentiments suggérés, mais son art était comme grossi à la loupe, surexposant en particulier les disparités de son timbre sombre. Le Voyage d’hiver le trouve mieux à son affaire. Toujours accompagné par Helmut Deutsch, pianiste sûr et sobre à défaut d’être inspiré, il a des moments de grâce (Der Lindenbaum) et des tourments saisissants, mais ses phrasés très contrastés et sa diction démonstrative pourront là aussi gêner les amateurs de ténors – l'idéal Christoph Prégardien en tête - dans ce cycle surtout fréquenté par les barytons.
François Lafon

Winterreise
Jonas Kaufmann (ténor), Helmut Deutsch (piano)
1 CD Sony Classical 8888 379565 2
1 h 13 min

mis en ligne le jeudi 15 mai 2014

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