Il Mondo della Luna (1777), sur un livret d’après Carlo Goldoni, est un des opéras de Haydn les plus joués depuis sa résurrection dans sa version originale aux festivals de Hollande et d’Aix-en-Provence de 1959. L’Atelier lyrique de l’Opéra national de Paris s’en empare à son tour. Mise en scène très convaincante de David Lescot, qui pour une fois ne tourne pas l’argument en dérision, malgré sa volonté de le mettre en relation avec notre époque : récitatifs prolongés à l‘occasion par des bruits de synthétiseur, premier acte dans un bidonville, sur un terrain vague avec pneu de voiture et roulotte bien en évidence (référence à l’univers cinématographique d’Ettore Scola), deuxième acte sur une lune aride, à l’opposé d’un monde rêvé, encombrée des détritus du précédent. Surtout, personnages des plus crédibles, parfois agités et désarticulés mais ne sombrant jamais dans le ridicule. Mention spéciale au jeune baryton portugais Tiago Matos en barbon Buonafede, chargé d’ans tant par son grimage que par ses gestes, à la mezzo-soprano Anna Pennisi en servante Lisetta, rôle en or s’il en est, et à l’Orchestre Atelier-Ostinato dirigé par Guillaume Tourniaire, remarquable en particulier dans les épisodes en nuance piano. Mais il ne saurait être question ici de distribution des prix. L’essentiel ? Mission remplie pour l’Atelier Lyrique : présenter un spectacle qui se tient, offrir aux habitués de l’opéra, à ceux qui y font leurs premiers pas et à tous les intermédiaires imaginables une soirée dont ils se souviendront.
Marc Vignal
MC 93 (Bobigny), jusqu’au 28 juin Photo © Opéra de Paris/M. Magliocca