Que le festival de La Chaise Dieu ait consacré une soirée entière au grand Henry Purcell (1659-1695) est dans l’ordre des choses. Organiste à Westminster de Londres dès 1679, Purcell devient en quelque sorte le musicien officiel de la monarchie anglaise et est reconnu par ses compatriotes comme le premier compositeur du pays. Après la chute de Jacques II en 1688, il compose la musique du couronnement de Mary II, fille de ce dernier, et de Guillaume III (d’Orange), son époux, avec notamment Praise the Lord, O Jerusalem. Cette page ouvrait le splendide concert du Chœur de chambre toulousain Les Eléments et du Concerto Soave dirigés par Joël Sububiette. Entendus également, plusieurs Anthems (hymnes), ouvrages destinés au culte soit à Westminster soit à la chapelle royale et s’inscrivant dans la glorieuse tradition élizabéthaine et jacobéenne (fin du XVIe siècle et début du XVIIe) tout en tenant compte parfois des acquis de l’école « moderne » italienne. Ne fut pas oublié (sous forme d’extraits instrumentaux) le semi-opéra The Fairy Queen, où triomphe le génie lyrique et dramatique de Purcell, un des premiers du XVIIe siècle. En 1692, Purcell compose pour les trente ans de la reine Mary l’ode Love’s Goddess Sure Was Blind, vaste et d’une invention inépuisable, et trois ans plus tard, pour ses funérailles (precédant de peu les siennes), réunit trois de ses plus beaux et plus célèbres Anthems, dont Man that is Born of a Woman. Moments mémorables, comme ceux vécus à l’écoute de l’extraordinaire hymne vespéral Now that the Sun hath Veiled his Light pour soprano et basse continue, chanté avec intensité et émotion par Maria Cristina Kiehr. Célébrer Purcell comme il faut n’est pas l’apanage des artistes britanniques.
Marc Vignal
Basilique Saint-Julien de Brioude, 27 août (à suivre)