Lo Speziale aux Athévains, Orlando Paladino au Châtelet, maintenant Il Mondo della Luna : trois opéras de Haydn à Paris depuis le début de l’année, mais trois réalisations très différentes ! Il est possible de « réduire » un opéra, si sa musique et sa dramaturgie s’y prêtent. C’est le cas d’Il Mondo della Luna, « dramma giocoso per musica » en trois actes sur un livret d’après Goldoni (1777). Au Théâtre Mouffetard, l’orchestre est remplacé par un simple pianoforte, à l’exclusion de tout autre instrument, et le nombre de personnages limité à cinq, au lieu des sept de l’original. Manquent Flaminia, une des filles du barbon Buonafede, et son amoureux Ernesto : les deux parties « sérieuses » de l’ouvrage. Le spectacle dure 1h 35’, au lieu des 2h 15’ de l’opéra dans son intégralité. Même les personnages retenus se voient privés de certains airs : Buonafede de son anthologique « Che mondo amabile » à l’acte II. Sans doute parce que là justement, les couleurs orchestrales sont primordiales, impossibles à rendre au seul pianoforte. Le finale de cet acte est amputé de son début. Mais miracle : la musique de Haydn renverse la situation. Grâce à elle, on dresse plus d’une fois l’oreille (finale de l’acte I au moment du supposé envol vers la lune), grâce aussi aux interprètes, à la tête desquels on a envie de placer Anna Reinhold, très présente vocalement et scéniquement en servante Lisetta. La mise en scène d’Alexandra Lacroix évoque la première expédition vers la lune, en juillet 1969.
Marc Vignal
Théâtre Mouffetard, Compagnie Manque Pas d’Airs. Jusqu’au 21 avril Photo © Accent tonique