Vendredi 19 avril 2024
Voyage au-delà de la nuit
Matthias Goerne, un chanteur beckettien chez Schubert
Nacht und Träume

Goerne-Schubert, tome 5. On pensait, avec les quatre premiers, être allés aussi loin que possible dans la nuit, la brume, les tourments de l’âme. Eh bien non ! Avec celui-ci, titré Nacht und Träume (Nuit et rêves, du nom du lied qui ouvre le récital) on franchit encore un pas. Tous les lieder de ce volume ne sont pas sinistres, loin de là, et la Sérénade (Ständchen) sur un extrait du Cymbeline de Shakespeare, ou le Chant de moisson (Erntelied), sur un poème de Hölty, viennent éclairer le paysage, mais partout règne la mélancolie, guette la fatalité. Matthias Goerne, pourtant, ne force pas le trait, ni ne tombe dans l’explication de texte. On a même rarement entendu interprète moins interventionniste : legato, articulation, contrôle de la couleur vocale sont, si l’on peut dire, ses seules armes. Du coup, la plupart de ses confrères paraissent extérieurs, voire maniérés, à commencer par l’intouchable Dietrich Fischer-Dieskau, lequel se retrouve, toute révérence mise à part, relégué au rang de référence d’un autre temps. Samuel Beckett, qui aimait Schubert plus que tout et le jouait fort bien au piano, se serait retrouvé dans cet art sans effet. C’est cette fois Alexander Schmalcz qui accompagne Goerne. Après Elisabeth Leonskaia (vol. 1) et Christoph Eschenbach (vol. 3), il paraît effacé. En fait, il participe utilement au travail d’épure auquel se livre le chanteur.
François Lafon

17 Lieder
Matthias Goerne (baryton, Alexander Schmalcz (piano)
1 CD Harmonia Mundi HMC 902063
1 h 01 minutes

mis en ligne le mardi 1 février 2011

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