Jeudi 28 mars 2024
Musica dolorosa
Belohlavek s’en est allé en signant un Stabat mater liquide
Dvorak - Stabat Mater

Première œuvre liturgique de Dvorak, ce Stabat Mater est dédié à son épouse, cette mère endeuillée du décès de ses trois enfants coups sur coups en 1875 et 76. Œuvre monumentale, elle fait penser à une immense fresque montagneuse en musique, car elle a les traits d’un tel paysage : la grandeur ; l’aspect à fois mystérieux et reposant ; les amples lignes de crêtes qui le parcourent comme le leit motiv tout au long de la partition ; les jeux d’ombres et de lumière ; et ces pentes, enfin, qui s’élèvent et se fracturent – telle l’âme face à la mort. Par un hasard paradoxal, Jiri Belohlavek (décédé le 31 mai) a enregistré ici ce Stabat Mater pour la troisième fois. Le Czech Philarmonic, orchestre splendide aux riches couleurs, aux phrasés puissants et amples, rend cette fresque aussi impressionnante que sobre, comme vue d’en haut ; les chœurs sont opulents et clairs, et les solistes en parfaite symbiose avec l’orchestre et son chef dont il a été dit qu’il a les oreilles d'un hibou et la patience de répéter une phrase musicale jusqu'à ce quelle devienne liquide. Au moment ultime de Belohlavek, dépositaire de l’âme tchèque, c’est la musique de cette région qui fait figure aujourd’hui de mère endeuillée.
Albéric Lagier

Stabat Mater op.58
Eri Nakamura (soprano), Elisabeth Kulman (mezzo-soprano), Michael Spyres (ténor), Jongmin Park (basse)
Czech Philarmonic, Prague Philarmonic Choir
Direction musicale : Jiri Belohlavek
2 CD Decca 4531510 9
1 h 23 min

mis en ligne le dimanche 25 juin 2017

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