Jeudi 18 avril 2024
Du spleen et des mouches
La mélancolie du luth par Anthony Bailes
Une Douceur violente

« Poète, prends ton luth et me donne un baiser, » dit à Alfred de Musset la Muse de sa Nuit de mai. Poète, Anthony Bailes l’est à coup sûr quand il égrène avec grâce sur son luth des mélodies françaises du XVIIème siècle. Quant au baiser, avec le titre de cet album en forme d’oxymore, il prend bien soin de nous prévenir que celui qu’il nous offre reflète, comme chez Musset, toutes les douleurs du monde. « Les plus désespérés sont les chants les plus beaux et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots, » poursuit la Muse. Deux cents ans avant Musset, Charles Mouton, comme Jacques de Gallot et son neveu Pierre, distillent le vague à l’âme et la mélancolie, ce spleen que les romantiques traîneront jusqu’à en mourir. Mais ces compositeurs du Grand Siècle sont capables aussi d’éclats, de vivacité, d’espièglerie, et les voici alors bien dans leur époque comme s’ils traduisaient en musique le langage des mouches dont les femmes se paraient le visage. On pourrait, d’ailleurs, presque attribuer le nom de l’une d’entre elles à chacune des pièces enregistrées ici : l’assassine (près de l’œil), la coquette (sous la lèvre), la discrète (sur le menton), la généreuse (sur la poitrine), la galante (sur la joue)… Se livrer à ce petit jeu en écoutant ces airs de luth leur donne aussitôt un nouveau relief.
Gérard Pangon

Jacques de Gallot : Pièces en la mineur, en fa mineur et en do majeur ; Les Plaintes de Psyché – Pierre Gallot : Pièces en sol mineur – Charles Mouton : Pièces en do majeur et la mineur.
Anthony Bailes (luth)
1 CD Ramée RAM 1104
1 h 08 min

mis en ligne le vendredi 13 avril 2012

Bookmark and Share
Contact et mentions légales.
Si vous souhaitez être informé des nouveautés de Musikzen laissez votre adresse mail
De A comme Albéniz à Z comme Zimerman,
deux ou trois choses et quelques CD pour connaître.