Jeudi 28 mars 2024
De l'art de réinventer un tube
Une version chambriste du Concerto d'Aranjuez par E. Rossfelder
Concerto d’Aranjuez – Fantaisie pour un gentilhomme

On ne s’interroge jamais assez sur la vie des tubes. Par exemple, à Leipzig à l’époque de Bach, combien étaient-ils à siffloter Que ma joie demeure sous la douche ? Et à Vienne, à la fin des années 1780, chantonnait-on la Marche turque de Mozart en attendant l’autobus ? Trêve de plaisanteries. Aujourd’hui que la communication règne tous azimuts, pas facile, a contrario, de s’échapper d’un tube, autrement dit d’aborder une œuvre qui a déjà fait 500 000 fois le tour du monde, sans apparaître comme le énième ressasseur. Voilà le défi relevé ici par Emmanuel Rossfelder alors que Miles Davis, Richard Anthony, Jean-Christian Michel et des dizaines d’autres ont déjà labouré en tout sens ce Concerto de Joaquín Rodrigo. Les pièges, on s’en doute, fourmillent dans l’adagio, le mouvement tube, pour lequel il faut trouver un équilibre entre la guitare et l’orchestre, adapter un tempo qui n’étire ni ne rétrécit et faire oublier le sirop ajouté par les rois de la variétoche. L’intelligence de cette version est d’en donner une interprétation « de chambre », c’est-à-dire en forme de dialogue au coin du feu, où chacun joue sa partie avec rigueur et sentiment, mais sans sécheresse ni sensiblerie. Dans ce tête-à-tête avec un orchestre bien maîtrisé, l’élégance et la délicatesse d’Emmanuel Rossfelder font merveille, comme dans la Fantaisie pour un gentilhomme où sa virtuosité lui permet de mettre en valeur toutes les nuances.
Gérard Pangon

Concerto d’Aranjuez – Fantaisie pour un gentilhomme
Emmanuel Rossfelder (guitare)
Orchestre d’Auvergne
Direction musicale : Arie van Beek
1 CD Loreley LY050
45 min

mis en ligne le vendredi 28 décembre 2012

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