Jeudi 28 mars 2024
Contre la montre
Plateau de luxe pour un Enlèvement au sérail mené tambour battant
 
Le même, pas pareil
Enlèvement
sans fioritures
Arleen Auger - Karl Böhm
L\'Enlèvement au sérail

Dans un univers lyrico-disco-économique où les captations vidéo ont eu raison des enregistrements audio, Mozart résiste : René Jacobs chez Harmonia Mundi, Teodor Currentzis chez Sony, Yannick Nézet-Séguin chez DG. Ce dernier, enregistré live à Baden-Baden, fait équipe avec le ténor Rolando Villazon, désormais retiré du répertoire romantico-vériste. Après Don Giovanni et Cosi fan tutte, où il se fondait dans des ensembles stylistiquement informés, le voici en première ligne - et en allemand - dans L’Enlèvement au sérail, étoile scintillante - mais pas la plus vendeuse - de la galaxie lyrique mozartienne. Autour de lui, une équipe sans faiblesse menée par Diana Damrau, laquelle immortalise un rôle (et quel ! la pyrotechnique Konstanze) que l’élargissement de son répertoire - et de sa voix - risquent de lui interdire à l’avenir. On pourra reprocher au premier sa tendance fermement réprimée mais toujours irrépressible à crooner et à la seconde son habituelle préciosité (ah, la simplicité des grandes aînées, Arleen Auger avec Karl Böhm, Christiane Eda-Pierre avec Colin Davis !). On admirera en revanche sans réserve la truculente élégance (mais oui !) et les graves abyssaux de Franz-Josef Selig, digne successeur de Martti Talvela et Kurt Moll en Osmin, ainsi que la fraîcheur du couple Anna Prohaska - Paul Schweinester, beaucoup plus convaincant ici qu’au Palais Garnier à la rentrée dernière, dans l’impossible mise en scène de Zabou Breitman. Rien à dire à part cela de Thomas Quasthoff, grand chanteur reconverti en récitant, et perdu en pacha magnanime dans des passages parlés peu travaillés. Jeune chef moderne, Nézet-Séguin entretient la tradition tout en gardant un œil sur les baroqueux, mais sa raideur et sa perpétuelle course contre la montre ont tendance à aplanir une musique qui mérite – ô combien – plus de subtilité. Vivement L’Enlèvement revisité par René Jacobs, étrenné en concert de la façon la plus prometteuse.
François Lafon

L'Enlèvement au sérail
Diana Damrau (Konstanze), Rolando Villazon (Belmonte), Franz-Josef Selig (Osmin), Anna Prohaska (Blonde), Paul Schweinester (Pedrillo), Thomas Quasthoff (Selim)
Vocalensemble Rastatt, Orchestre de Chambre d'Europe
Direction musicale : Yannick Nézet-Séguin
2 CD Deutsche Grammophon 479 4064
2 h 20 min

mis en ligne le vendredi 10 juillet 2015

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