Vendredi 19 avril 2024
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Opéra de Paris : Jephtha, oratorio fort en drame
dimanche 14 janvier 2018 à 02h26
A l’Opéra de Paris - Palais Garnier : Jephtha de Haendel mis en scène par Claus Guth, coproduit avec l’Opéra d’Amsterdam. Un oratorio à l’intrigue forte en drame, proche de celle d’Idomenée (Jephté, soldat et Juge d’Israël, promet à Yahvé, en cas de victoire, de lui sacrifier la première personne qu’il verra. Catastrophe : c’est sa propre fille qui se présente). L’Opéra de Stuttgart en avait déjà donné une version scénique au Palais Garnier en 1959. A Strasbourg en 2009, Jean-Marie Villégier s’y est essayé. Un loup solitaire capable de la plus grande violence pour revendiquer sa foi : sans céder aux amalgames faciles (ni burqa ni Kalachnikov), Guth déplace la fable dans un ici et maintenant suggéré. Qu’y gagne l’œuvre, fresque puissante aux chœurs imposants, dernier oratorio de Haendel au bord de la cécité ? Pas grand-chose jusqu’à l’entracte, où se succèdent tableaux (pas très) vivants et actions redondantes rythmées par des parenthèses électroniques formant hiatus avec la musique, au milieu des lettres mouvantes « It must be so » (Il doit en être ainsi), premiers mots du livret, ordre inéluctable dont découle toute l’histoire. A partir de la tragique reconnaissance, nous sommes au théâtre, jusqu’à ce final étonnant où, à l’encontre du récit biblique, un ange vient délivrer Jephtha de son serment à condition que sa fille se fasse religieuse, délire à prendre au pied de la lettre selon Guth, qui nous montre le père « comme si le sang de la vie l’avait quitté » et la fille éventrant un oreiller sur son lit de couvent-hôpital. Au rideau final : quelques huées pour le metteur en scène (qui continue de payer sa récente Bohème spatiale à l’Opéra Bastille – voir ici), triomphe en revanche pour William Christie et Les Arts Florissants (quel chœur !) et pour un plateau de grand luxe, où Marie-Nicole Lemieux et Philippe Sly jouent les guest stars, où les contre-ténors Tim Mead et Valer Sabadus rivalisent de prouesses pyrotechniques, et où Ian Bostridge et Katherine Watson donnent chair et âme au très freudien duo père-fille. 
François Lafon

Opéra National de Paris – Palais Garnier jusqu’au 30 janvier. En différé sur France Musique le 28 janvier à 20h
(Photo © Monika Rittershaus/OnP)

 

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